Histoire de Cybertown >> Votre personnage

Le voyage d'Ord-Rell

créé par Ordrell le 12 April 2019 à 13:24.
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Ordrell
Survivaliste
Ce topic va me servir à écrire des nouvelles qui feront office de BG à Ord-Rell au niveau de son voyage qui a précédé son arrivée à Cybertown.
Plus que pour les besoins du jeu, c'est déjà avant tout un petit défi personnel, ce que j'appelle mes défis d'entretient, ici d'écriture. J'aime me faire plaisir à prendre un thème d'univers et à broder dessus des histoires. Pour le coup, se passant dans le désert extérieur, je risque de passer pas mal à coté du coté cyberpunk, pour d'avantage me centrer sur un style post apo steam/diesel punk. C'est un style que j'apprécie et dans lequel j'ai déjà écris, alors j'ai déjà une douzaine d'idées de nouvelles en stock, il faut juste par contre que je trouve le temps d'écrire ça tranquillement petit à petit. Je ferai autant que possible pour me lier de manière crédible au BG du jeu que j'ai lu, mais si toutefois il y a des trucs qui sont vraiment à coté de la plaque, je laisse les MJ me contacter qu'on en discute, auquel cas je mettrai un encart hors BG à coté du titre de la nouvelle.
Chaque nouvelle est indépendante, et pas forcément par ordre chronologique du voyage, ça dépendra de mes envies d'écriture et inspiration. Mais tout reste lié quand même, il sera même possible de retracer le trajet approximatif parcouru d'après les indices que je laisserai.
Et bien sur tout ce qui est là est inconnu des perso à moins qu'il ne vous en parle.
Bonne lecture.
Ordrell
Survivaliste

Le Mont Venteux



Les pieds se traînent un peu sur le sol sablonneux chauffé par un soleil intense. L’homme plisse les yeux sous son chapeau usé et regarde perplexe la muraille devant lui qui se dresse au milieu de rien du tout. Il est à bout de souffle et crève la faim. Ses habits sont plus qu’usés et couvert de la poussière du désert qui empli le monde.
Il tombe à genou sans trop croire ce qu’il voit. C’était ça ? Est-ce qu’il était arrivé quelque part ?
Tout son instinct, ses sentiments à devoir se rendre au nord, tout ce qui lui était arrivé était-il écrit ? Prévu d’une quelconque manière ?
L’homme grogne et se redresse difficilement, reprenant sa marche pour terminer les derniers mètres qui le sépare de sa découverte.


Il est curieux de constater cette drôle d’impression qui nous vient quand on accompli enfin un but après des années d’errance. Un but dont on ne se savait pas vraiment conscient jusqu’à ce qu’il se révèle soudainement à soi.
Je suis arrivé il y a peu à ce refuge dans le nord qu’on appelle Cybertown N°1. Des murs d’enceinte, des cultures, des maisons en dur et même un train. Je n’avais jamais rencontré de telle structure durant tout mon trajet dans l’espace sauvage qui m’y a conduit. Ce n’est pas faute d’avoir cherché où d’avoir découvert bien d’autres choses.
Il y a des habitants, plus nombreux aussi que tout ce que j’ai vu depuis les abris souterrains. Pour le moment tout le monde joue de proximité, se tutoie, c’est assez étrange d’arriver dans une communauté déjà établi avec ses règles, ses bonnes gens et ses cons. Je n’ai pas l’habitude. J’étais plutôt un solitaire forcé. Etre d’un coup avec « beaucoup » de monde, c’est perturbant. On m’accueille bien pour le moment mais je fais profil bas. Je n’ai pas de quoi flamber, j’ai perdu toute ma force d’antan, ce voyage m’a éprouvé. Tout mon équipement aussi je l’ai perdu. Je suis arrivé vraiment comme une loque. J’en ai honte mais j’essaye de faire comme si de rien. Ça à l’air normal apparemment.
Alors j’observe, je vois ce qui est fait, et peut être à faire dans ces lieux. Mais ça c’est l’avenir. Ici je vais plutôt vous parler de mon passé.
Je m’appelle Ord-Rell Kanagan, et voici les récits de mon long voyage…



Quelques années plus tôt…
Voilà quelques jours qu’il était sorti d’un abri souterrain sordide. Il préférait oublier cette période désagréable, vraiment. Fuir pour aller ailleurs. Chercher quoi ? Aucune idée mais tout sauf rester dans le noir dans ces conditions déplorables.
Rien ne dit que l’extérieur serait plus simple, mais différent certainement.
Des intérieurs conditionnés il était passé aux extérieurs brulants, du béton sale au sable s’insinuant partout.

Ord-Rell était passé il y a peu dans les ruines d’une ancienne cité, pas spécialement vaste mais suffisante pour fouiller les débris. Une aubaine à vrai dire de pouvoir se recharger en tout et n’importe quoi, mais surtout du n’importe quoi inutile. Quoi que l’inutile des uns peut devenir l’utile des autres. Alors pour les trocs éventuels qu’il en tirerait, il avait rempli son sac de bric et de broc trouvés dans les ruines et laissés là par les pilleurs précédents. Se contenter de restes. Et les suivants eux même prendront les restes de ses restes.
Son sac lourd de matos sur l’épaule, il était passé devant une arche de pierre sculptée bizarrement inutile émergeant du sable, mais qui semblait trainer là depuis des milliers d’années. Des quelques traces de noms quasi effacé qu’il avait relevé dans les ruines, il s’était interrogé sur le coté incongru d’appeler une ville comme une couleur. Etaient-ils si en manque d’inspiration à l’époque ? C’est comme si on appelait un lieu bleu, ou rouge…

Sa marche actuelle l’avait conduit vers l’est. En effet sur la colline dénudée qui dominait l’ancienne cité, il avait vu sur l’horizon une haute montagne qui se démarquait du reste. Pour s’orienter valait mieux prendre des hauteurs, et faire un choix de trajets à partir de là. Mais c’est fou ce que les distances sont trompeuse. Alors qu’il escaladait aujourd’hui les pentes de ce mont, il lui avait fallu deux jours rien que pour y arriver.
Le sol traitre de cette montagne faite surtout de pierres grises et roulantes ne l’aidait pas à progresser. Les quelques végétaux secs qui l’entouraient disparaissaient totalement au sommet de cette barre rocheuse allongée, laissant une extrémité chauve et lisse comme un crâne du coté ouest.
Hormis le son du vent sur la pente, il n’y avait guère de bruit alentour. Un vent qui forcissait au fur et à mesure de sa montée, si bien qu’une fois arrivée vers les plus hautes positions, il comprit pourquoi tout était à nu. La roche était tellement violemment balayée par les vents de la région, concentrés par la barrière naturelle de la montagne, que rien ne pouvait plus y pousser. Un mont venteux c’est sur… Il marchait penché en avant, tenant son châle entourant son visage. Ses googles de verre, presque translucides, le protégeaient des poussières volantes. Il s’installa contre un rocher et posa son sac, commençant à prendre connaissance de toute la région environnante. A l’ouest à présent il savait ce qu’il y avait, en venant. Au nord, une longue plaine sèche continuait à l’infini, entrecoupés de quelques collines. Vers l’est et nord-est se voyaient au loin les contreforts de hautes montagnes, certainement pas le trajet le plus aisé. De toute façon la décision était déjà pliée. Il faisait beaucoup trop chaud dans le sud c’était intenable, il fallait absolument qu’il fuit vers le nord, par cette vallée là.

Il risqua un coup d’œil au sud tout de même et se figea. Plaines et collines se succédaient jusqu’à ce que l’horizon soit masqué par une autre haute barre rocheuse au plein sud. Mais ce qu’il y avait au-delà était bien plus inquiétant. Roulant comme un ciel des enfers, une immense tempête de sable ocre fonçait vers lui. Il resta un moment captivé avant de voir la tempête s’approcher de la montagne au loin. Bien que haute surement d’au moins 1000m, la tempête lui roula dessus et l’enveloppa comme un vulgaire caillou, la faisant disparaitre sous ses remous. Rell prit conscience de la vitesse de progression et de son exposition présente. S’il restait ici au sommet, il allait être balayé comme une poussière ridicule. Il prit son sac et se remit en route hâtivement. Sa seule chance était de prendre la face nord, contraire à la tempête, et d’espérer peut être que la montagne ferai un bouclier suffisant contre les vents directs.
Dans sa main, il tenait une lance, dont il se servait pour s’aider à descendre la pente comme une troisième jambe et garder plus d’équilibre dans sa fuite. C’était aussi la seule arme dont il disposait. Il avait pu partir du bunker avec quelques équipements mais il ne pouvait pas tout prendre non plus. Un strict nécessaire, le reste il faudrai qu’il le trouve par lui même.
Le grondement de la tempête approchante se fit plus intense, et pourtant il n’était même pas à mi hauteur de la pente. Il avait recouvré une zone avec un peu plus de végétation mais ça restait des herbes rases et des cactus, ou autre épineux résistant à la sécheresse. Aucun vrai abri salutaire n’était en vue. Quand un drôle de hurlement se fit entendre, il leva la tête, pour voir le front de tempête passer la crête, monstrueuse vague grise orangée qui explosait au dessus de lui. Il augmenta sa course dans les pierriers, ne sachant où aller vraiment. L’onde violente roulait et s’étendait au dessus de lui s’échappant vers l’avant, puis commença à retomber en avant de la montagne bien devant lui. Il ne serai pas protégé, il allait être prit en tenaille. La vague de sable s’effondra au sol, toujours alimentée par la puissance de la tempête au sommet, un courant en tourbillon se mit en marche, le front remontant la pente droit vers lui.
La tempête de poussière eu tôt fait d’être à son niveau et de l’envahir. Elle était certes moins forte que s’il avait subit la tempête en frontal sur la face sud, mais la puissance était déjà considérable. Il se ratatina sur lui-même et essaya de tenir, son cache-poussière battant au vent mais ne cachant plus grand-chose.
Chaque pas était devenu presque impossible, ses pieds glissaient et son corps avait tendance à vouloir voler dans l’autre sens. Les pierres roulantes achevèrent de le déséquilibrer et il tomba au sol, entrainé dans la pente qu’il se mit à dévaler en bringuebalant sur lui même. Il n’eu pas l’occasion d’en voir beaucoup plus, sa tête heurta une pierre et il perdit connaissance.


On lui tirait la jambe.
Non c’était une impression, il était engourdit de partout, avec un mal de crâne. La lumière était plus faible. Encore une secousse, si si on lui tirait la jambe.
Il se concentra pour rouvrir les yeux, c’était le crépuscule, la tempête était passée. Son corps était à demi enseveli sous une couche de sable. À ses pieds, un coyote était là, et s’échinait à lui tirer les chausses. Ord-Rell fronça et gueula en redressant son corps en position assise tout en remuant les bras.
- Hey ! Dégages ! Jsuis pas encore mort !
Le coyote fit un bond en arrière surprit et trottina pour se reculer à plusieurs mètres, l’observant de là.
L’homme grogna et remua son corps à droite à gauche, se dégageant du sable.
Il chercha sa lance qu’il trouva étendue à coté de lui et la saisi pour s’en servir de béquille pour se relever.
- Va t-en jt’ai dit ! Raaa !
Il remua la lance vers le coyote qui refit des petits bonds de coté mais sans montrer plus d’intention de filer. L’animal grogna doucement.
- Ha tu veux jouer à ça saloperie… T’as faim, ça tombe bien, moi aussi !
L’homme se cala plus solidement sur ses jambes et positionna sa lance en attaque, la tenant fermement à deux mains, dressée droit devant lui, et prête à partir d’un coup en avant. Il fit un pas de coté, l’animal se tassa sur ses jambes, prêt à bondir, les oreilles en arrière.

Des voix, souvenirs, déboulèrent dans sa tête. L’obscurité d’un bunker, un cri féminin et une voix qui l’interpelle.
- Te mêle pas de ça Ord-Rell.


L’attaque est rapide, le coyote bondit, Ord-Rell aussi.

Un gars déguenillé et patibulaire se retourne et lui fait face, il a un couteau, trop maigre portée quand sa lame fend l’air. Le couteau vol, frappé par la lance, qui tournoi encore.

Les mâchoires du coyote se tendent, les réflexes de l’homme réagissent. D’un mouvement des bras, la hampe de la lance intercepte la tête de l’animal et la repousse. Il tourne sur lui-même pour achever le pivotement de l’arme, la pointe remise en avant il la plante dans le corps de l’animal.

Un cri rauque s’échappe de l’homme à terre, la pointe de lance lui transperçant la poitrine, Rell retirant son pied de l’homme au sol ainsi que sa lame.

Ord-Rell secoue la tête pour se sortir les images. Le coyote émet un dernier couinement, et Rell se dégage et nettoie nonchalamment la lame sur la fourrure. L’odeur du sang ça attire rarement des alliés. Mais il aurait à manger ce soir et peut être un peu plus s’il fait sécher la viande.

L’obscurité envahissait petit à petit le flanc nord de la montagne, l’air plus frais aussi. Au loin à présent au nord la tempête de sable faiblissait en continuant de rouler par dessus monts et vaux.

Un petit éclat de feu annonçant un repas illumina ce coin de montagne.
Ordrell
Survivaliste

Le troqueur itinérant



Une des règles de survie sur la durée dans l’espace sauvage c’est ne jamais être seul. Je veux dire, seul vraiment seul. Parce qu’un individu seul ne peut pas subvenir complètement à ses besoins, en matière de récolte des ressources nécessaire à la survie, et je ne parle pas que de nourriture et d’eau, mais aussi d’arme, de matériel, d’outil, de soins…
C’est pour ça que le troc fini à un moment ou un autre par être capital, voir vital. Parce qu’on tuerai pour avoir quelque chose qui nous manque cruellement, et qu’on ne le trouve pas. On est alors dépendant de ce que les autres eux trouvent.
Il faut donc fouiller partout où on passe, dans les anciennes cités, récupérer tout ce qu’on peut porter, et attendre de croiser du monde. Car on fini toujours par en croiser même si cela peut prendre plusieurs semaines. Et alors des échanges peuvent se faire pour récupérer des choses qui pourront vous sauver la vie plus tard. Ça m’est arrivé plusieurs fois, et même s’il faut toujours se méfier des rencontres, ça reste une chance de pouvoir faire des échanges. Et d’autant plus quand on croise la route d’un troqueur itinérant.



Ord-Rell était assis sur un pan de mur effondré, devant une maison qui ne tenait debout que par ses trois autres murs. Le soleil se couchait sur l’horizon, peignant de rouge rosé toutes les ruines qui l’entouraient. Grignotant tranquillement une tranche de cactus cueilli plus tôt, il regardait dans le vague pensivement.
Il avait passé ses derniers jours principalement à voyager de nuit. La période était peu propice aux voyages en journée, où la chaleur était suffocante, et le manque d’ombre dans ces terres désolées n’aidait pas à supporter la situation. Par chance il avait prit un bon itinéraire. Suivant une ancienne vallée fluviale, il longeait un mince court d’eau, qui autrefois devait être un grand fleuve qui remplissait toute la large cuvette de son lit. Il remontait globalement vers le nord. Mais surtout l’avantage à suivre des anciens court d’eau majeur, c’est qu’on était plus enclin à tomber sur des restes de cités qui s’étaient établi le long des rives. Des endroits donc pour se réapprovisionner en bordel divers, et surtout avec un peu de chance de quoi trouver une cave qui tient encore debout pour s’abriter pendant la journée et se reposer au frais, en attendant le départ nocturne.

Il n’avait encore croisé personne depuis son départ. Strictement personne. Non pas qu’il cherchait absolument de la compagnie, mais il avait un peu l’impression de stagner et de trouver toujours les mêmes choses dans les ruines. Il se demandait bien comment pouvait se débrouiller les autres survivants.
Le soleil passa sous la barre de l’horizon, et la lumière si bien que la température déclinèrent rapidement.
Saisissant ses affaires, l’homme se remit en route, quittant son abris de jour pour repartir dans le large lit et le long du ru vers le nord.

*
* *


La nuit fut calme, silencieuse, et les kilomètres s’enfilèrent sans s’en rendre compte, perdu qu’il était dans des pensées d’un autre temps qu’il essayait de refouler en vain.
Le souci c’est que quand l’aube pointa, il n’avait toujours pas rejoins de reste de cité, et donc aucun abris providentiel.
La chaleur remonta aussi vite que les rayons claquaient de plus en plus dru sur la surface clair du sol.

Déjà en milieu de matinée, son foulard qui entourait sa tête épongeait sa transpiration. Il buvait régulièrement ce qui fait que sa gourde se vidait un peu trop vite. Et malgré le ru à coté il savait qu’il ne pouvait le boire tel quel. Mais tant pis il fallait faire une pause pour recharger. Il s’installa au bord du filet d’eau et commença le long travail de récolte. D’abord ramasser un certain volume, filtrer dans un tissu, plusieurs fois même, puis faire bouillir sur un feu, et ensuite seulement le mettre en gourde.

Alors qu’il faisait couler l’eau doucement dans le contenant en essayant de ne rien renverser, quelque chose à l’horizon attira son regard. Un petit nuage de poussière s’élevait. Non pas comme une tempête, mais plus comme provoqué par un déplacement de quelque chose sur le sol. Il fini son remplissage tout en gardant un œil sur l’horizon puis rangea sa gourde tout en se relevant.
Au fur et à mesure que ça s’approchait, il s’aperçu qu’il s’agissait de quelqu’un. Une personne qui poussait quelque chose, mais elle allait drôlement vite pour être à pied.
Alors que l’individu approchait, Ord-Rell se saisi de sa lance, prêt à on ne sait quoi, peut être allait-il falloir se défendre.
Un petit bruit de moteur se faisait entendre alors que l’étranger et son chargement devenait clairement visible.
Quand il ralenti en étant plus très loin, Ord-Rell pu détailler son accoutrement un peu spécial. Il avait les jambes enchâssées dans des hautes bottes mécaniques qui disposaient de deux larges roues sur les flancs et d’une troisième monté sur amortisseur à l’arrière du talon, en une sorte de parodie de roller tout terrain. Un tuyau flexible sortait de chaque botte pour rejoindre une chaudière dorsale montée comme un sac à dos et qui pétaradait doucement, une fumée grise sortant d’une petite cheminée.
Un autre tuyau rejoignait le charriot qu’il tenait fermement. Quatre roues disposées en milieu de châssis du charriot pouvaient tout aussi bien être motrices pour ce qu’il en savait.
L’individu était plutôt jeune avec un masque protecteur qui protégeait le bas du visage contre les vents et poussières. Ses cheveux blonds sales étaient retenus sous une calotte de cuir.

Il s’arrêta à quelque pas de Rell et lui lança avec un accent aux inflexions trainantes, peut être savoyard ou suisse :

- T’es pas des plus prudent toi hein ? Et si j’étais un chevaucheur de métal hein? Ou t’es très courageux ou bien complètement débile…

Rell ne répondit pas, le regardant avec méfiance, il pointait toujours sa lance vers l’étranger qui ne se démonta pas et releva ses googles qui cachaient ses yeux sur le front et éteignit son moteur dorsal.

- Ha ça va baisses moi donc ça t’as l’air con, je vais pas t’attaquer…

Ord-Rell fini par reposer sa lance au sol tout en le regardant. L’étranger s’affairai déjà à abaisser un levier de son chariot, qui d’un coup se déploya comme une énorme boîte à outils, mu par des jeux de ressorts. Le chariot dévoila de multiples casiers de rangements, d’étals, de présentoirs divers alors qu’un auvent en toile rouge se dépliait en éventail au dessus pour faire de l’ombre. Rell accueilli celle ci avec bénédiction. Pendant que l’individu poursuivait manuellement certain déploiement, il débitait en continu un flot de parole.

- Bref, salut, je suis Norim, troqueur itinérant, comme tu peux le voir. Si tu cherches quelque chose je dois avoir ça quelque part, car chez moi il y a tout et n’importe quoi, mais plus de tout que de n’importe quoi. Bouffe, habits, médocs, armes, équipements, outils, pièces détachées, suffit de demander. Alors qu’est ce qui te ferai plaisir mon gars ?

Ord-Rell garda le silence, un peu bouche bée pendant son discours de marchand, puis quelques secondes après la question il secoua la tête et se rapprocha encore de l’étal grand ouvert, qui avait bien quadruplé le volume du chariot d’origine.
Il eu une impression de joyeux désordre et pourtant il y avait une tentative de classer les choses par type. Pour l’instant il regardait surtout la variété de tout ce qui était proposé en bricoles et équipements, c’était inconcevable de voir autant. Tout semblait tentant et intéressant. Ce type devait passer son temps à fouiller ou…

- Comment t’as eu tout ça ?
- C’est mon job gars, les échanges avec les autres voyageurs comme toi, et le temps passé à fouiller, j’ai un peu plus d’expérience à savoir ce qui s’échange bien ou non alors je ne ramasse que les choses utiles.
- Hm j’ai trouvé des médocs, jsais pas c’que c’est tu peux p’tetr m’aider ?
- Ouai fais voir ?

Fouillant dans son sac, Ord-Rell sorti deux plaquettes d’alu et de plastique contenant des petites pilules marrons et les tendit au marchant. Il s’en empara et les examina brièvement tout en faisant des petits bruits de bouche, retourna les plaquettes pour regarder les restes de nom dessous avant de déclarer :

- Ouai, anti-chiasse ça.
- D’accord. Tu as des anti-douleur ?
- Ouai je t’échange contre trois plaquettes comme ça.
- Trois ? Mais j’en ai que deux.
- C’est très demandé, la valeur c’est pas la même. Trois pour un.
- J’ai pas. Ou sinon t’as contre le mal de crâne ?
- Ça ouai je peux te le faire en un pour un. Ça te dis ?
- Envoie.

Rangeant une des plaquettes dans ses affaires, Rell laissa l’autre au troqueur et lui prit celle avec les pilules jaune et bleu qu’il lui tendait. Norim le détailla un instant avant de lui demander :

- Et toi t’as quoi à proposer ?

Ord-Rell prit son sac et l’ouvrit, commençant à sortir quelques éléments.

- J’ai quelques pièces mécaniques, une boîte d’écrous, un tournevis rouillé mais il a l’air de tenir…

Norim opina doucement et examina les pièces, en écartant certaines.

- Ouai ça ça peut intéresser un chevaucheur d’métal. T’as de la bouffe ?
- De la barde de coyote séchée… C’est quoi un chevaucheur de métal ?

Le troqueur haussa un sourcil en le regardant.

- Ha ouai j’comprend mieux… t’es nouveau dans l’désert toi hm ? Et jvais tprendre un peu de coyote séché.
- Ça fait pas très longtemps. Il lui tendit une de ses bardes de viande préparées en avance.
- Bon alors écoutes bien. T’es pas tout seul à vadrouiller dans l’désert. Avec un peu de chance tu croiseras de temps en temps d’autres personnes. Mais évites toujours autant que possible les chevaucheurs de métal. Eux s’embêtent pas à discuter, ils te tuent et te pillent tout ce que tu as, t’abandonnant avec rien. Quand tu te reborn, si tu reborn…, quelques minutes après tu n’as plus rien. N’essayes pas de les fuir, ils sont montés sur des engins motorisés hétéroclites mais qui vont très vite. Ils te rattraperont. Donc caches toi plutôt ok ? Le meilleur moyen de les éviter c’est de ne pas être vu, donc te planter comme un poireau à attendre en plein milieu comme ça, plus jamais hein ?

Ord-Rell fit une moue et secoua la tête.

- Et donc toi tu bosses avec eux ?
- Ha… faut bien survivre. Ils me laissent en vie car ils savent qu’ils ont besoin de ce que je peux rapporter vu que je brasse énormément de produits. Mais croies pas que les négociations sont simples avec eux, en général j’y gagne pas grand-chose, ou bien ils me refilent les bribes inutiles de leur pillage, tout ce dont ils n’ont pas besoin.
- T’en profite aussi alors de leurs pillages…
- Écoutes ya pas de place pour la morale dans le désert ok ? C’est la survie avant tout, et si ça dois se faire aux dépend d’autres… Mais ma foi c’est pas moi qui les attaque en tout cas !

Rell l’écouta débiter ses excuses et repris son examen de l’étal, quand il aperçu un chapeau. Il s’en saisi pour l’examiner et le posa sur sa tête, au moins ça pourrai l’aider à se protéger du soleil plutôt que son châle qui entourait son visage.

- Le chapeau m’intéresse. Tu es d’où toi ?
- Ça marche, contre ce que tu m’as proposé.

Ils firent l’échange alors que le troqueur répondait tranquillement.

- J’étais de la région de Lausanne avant le Grand Flash. Quand ça s’est calmé dehors et que j’ai pu sortir et choisir de faire ce boulot, j’ai vite réalisé que ce n’était pas gérable juste dans les vallées montagnardes. Alors suis descendu jusqu’au couloir rhodanien où finalement il y a beaucoup plus de passages de voyageurs. C’est plus rentable ici.

Ord-Rell opina silencieusement et finalement retournant aux affaires il demanda :

- Tu as des armes ?
- Tu as déjà une arme. Certain n’en ont pas du tout
- Jte demande pas de débattre, dis moi ce que tu as.

Le troqueur s’avança vers son étal et fouilla dedans pour sortir le présentoir des armes.

- Couteaux, une machette, un gunlazer mais si tu n’as pas de recharge énergétique ça te sera inutile, arme à feu de calibre 7.62, et un fusil lance-lime.
- Fusil lance-lime ? Qu’est ce que c’est ?

Le troqueur s’empare de l’arme allongée pour lui détailler, montrant également les munitions.

- En gros un catapulteur de lime, ça c’est une lime.

Il lui montra une sorte de double lame de dague avec une forme de crochet au centre entre les deux pointes.

- J’ai presque trois chargeurs complet, c'est-à-dire deux à quatre limes et un avec que deux. Tu peux enchâsser les deux chargeurs comme ceci. Il les plaça en V au dessus du fut du canon. C’est un semi-auto, t’appuies ça part, tu réappuies, et une seconde lime part. C’est important que tu récupères chaque lime après les tirs, c’est réutilisable contrairement à des munitions à feu, tant que tu t’amuses pas à les esquinter en visant des murs. De temps en temps tu aiguises un peu si besoin comme un couteau.

Rell lui prit des mains pour tester le poids et la visée. Il aligna le canon vers un cactus à quelques mètres et tira. Après un déclic, la lame parti silencieusement à toute vitesse pour se ficher dans la plante.

- Hm… ça m’plait bien ça.

Il le redonna au troqueur et réfléchi.

- J’ai une peau de coyote là, fit-il en la déballant de ses affaires pour la tendre. Norim s’en saisi pour l’inspecter.
- Ouai c’est à peu près bien tanné, la découpe un peu grossière par endroit, et reste quelques taches de sang séché…
- C’est pour de la survie ou un défilé de beauté pour pétasse ?
Norim ricana un peu et mit la peau de coté.
- Va falloir plus que ça quand même.

Rell s’y attendait et chercha une petite boîte dans son sac qu’il ouvrit discrètement, il en sorti trois cartouches de munitions parmi la poignée qu’il avait et les proposa. Le troqueur avisa les munitions et les prit en main pour les soupeser et vérifier qu’elles étaient pleines. Il abaissa un petit monocle loupe devant un œil pour inspecter les traces de rouilles ou autre dégât minuscules qui pouvaient entraver la bonne tenue de la cartouche.

- Hm c’est déjà plus intéressant ouai. Mais…
Il fit un signe avec son pouce en l’air pour dire de grimper encore. Rell soupira.
- Encore ? Elles sont en très bon état !
- Ouai elles ont bonnes valeurs, mais là on parle d’un fusil lance-lime. Je peux te le dire tu ne trouveras pas d’autres armes de ce genre avant un bout de temps, et ça risque de s’arracher bien alors faut mettre le prix si tu veux que je te la laisse.
C’était le moment de jouer son va-tout, qu’il avait spécialement gardé pour une occasion comme celle-ci.
- Très bien, alors j’ai aussi quelque chose d’unique en échange que tu ne trouveras nul part.

Devant le regard curieux de Norim, il sorti une petite carte d’environ dix centimètres de coté. L’image dessus un peu effacé et aux couleurs altérées représentait un bol de nouilles chaudes avec des petits légumes, dans une présentation toute délicieuse. En appuyant sur un bouton discret, Rell déclencha l’électro-réclame, et la petite musique démarra, le nom du produit chanté par un duo de femmes, un homme annonçant les phrases intermédiaire.

♪ ♫ Maggle Noodlespass ♬♩♪
Nur wenig Geld
♩♬♫
♪ ♫ Maggle Noodlespass ♬♩♪
Schmeckt famos
♬♩♪♪
♪ ♫ Maggle Noodlespass ♬♩♪
Mit etwas heisses Wasser
♬♩♫
♪ ♫ Maggle Noodlespass ♬♩♪
Du bist einfach gut
♪ ♫♬♩♩♫


Au regard du troqueur alors que la musique se déroulait, Rell su qu’il avait gagné. La vieille réclame allemande avait eu le même effet sur lui quand il l’avait trouvé. De la musique… Même aussi pourri qu’entrainante comme celle là, le genre d’air qui vous trotte en tête pendant des jours ensuite. Il l’avait écouté et réécouté jusqu’à être dégoûté. La maigre nucléopile qui était à l’intérieur commençait à faiblir, il ressentait déjà la vitesse de la musique ralentir, mais le troqueur n’en savait rien. Il ricana et tendit une main avide.

- Fais voir !
Rell réagit en levant le bras, tenant la carte d’électro-réclame à bout de doigt.
- Alors ? Marché conclu ?
- Ok ok ça ira. Prends le.

Od-Rell sourit et prit le fusil après avoir donné la carte. Il n’avait plus rien à échanger maintenant.
Il soupira tandis qu’il inspectait l’arme et que le troqueur redéclenchait la musique publicitaire en se marrant. La réclame terminée, Norim releva la tête.

- Tu te rends où ?
- Vers le nord, répondit-il en haussant les épaules. Ya quelque chose à voir? Des cités pas loin?
- Hm si tu continues tu vas finir par tomber sur les restes d’une vaste cité, elle a été complètement rasée. Là-bas se terre la tribu du Lion.
- La… hein ? Des survivants ? Sont fréquentables ?
- Ça dépendra de toi. Tu veux encore autre chose ?
Rell regarda l’étal avec regret et fit une moue.
- Je crains de ne plus rien avoir à échanger pour cette fois.
- Ça roule, mais peut être on se recroisera si tu restes dans la région.

Norim commença à replier l’étal, y mettant son poids pour forcer les différents rangements à reprendre leurs places contre les ressorts. À demi allongé dessus à la fin pour le maintenir, il remit le levier dans sa position initiale pour verrouiller. Puis il se redressa et retourna se mettre en roulant tranquillement derrière les barres de poussée. Saisissant une poignée reliée à un câble, il tira d’un coup sec et sa machine dorsale reparti en pétaradant.

- Aller, à plus voyageur !

Sur quoi il reparti en vrombissant dans le désert, les rollers à ses pieds s’activant pour le pousser lui et son matos.
Rell le regarda partir et fit un tour d’horizon du regard. Il rassembla ses affaires et but une gorgée d’eau avant de reprendre la route. S’arrêtant au bout de quelques pas, il fit demi-tour pour retourner au cactus où était encore fichée une lime. Il la récupéra pour la ranger dans le chargeur et se mit pour de bon en route.
Ordrell
Survivaliste

Les prédateurs



Dans une nature hostile, les être vivants se hiérarchisent rapidement quand ils sont mis face à face.
Pour faire simple on dit que le serpent chasse le scorpion. Le coyote chasse le serpent. Le voyageur chasse le coyote. Et le chevaucheur chasse le voyageur. Mais en réalité les relations sont bien plus complexes que ça. Un chevaucheur peut mourir d’une piqûre de scorpion, ou d’une morsure de serpent, ou dévoré par une meute de coyotes.
L’entrainement, l’équipement, la capacité d’adaptation, la connaissance du terrain, vos capacités physiques, sont autant de facteurs qui influeront sur votre position dans la chaîne. Certaines peuvent être augmentées avec l’expérience, de la volonté, de la préparation. Il ne tient alors qu’à chacun de définir s’il veut être une proie ou un prédateur.



La patte craquait sous les dents. La chair fut arrachée puis avalée sans attendre. Ord-Rell était devant son feu de début de soirée à grignoter son lézard grillé. Dans son autre main il tenait un morceau de cactus pour seul accompagnement. Il souffla par le nez, regardant les mouvements des flammes. Seuls leurs crépitements troublaient le silence environnant. Rell vivait souvent dans le silence. C’était pesant parfois, mais il s’y habituait. La solitude et le silence…
C’était des moments où il pouvait se remémorer certaines choses de son passé, malheureusement il en aurait bien voulu en oublier certaines, ou combler de trop nombreux manques. Mais quand on est seul avec ses pensées, on n’a pas d’autres choix que de les ressasser.
D’un autre coup de dent, il reprit un peu de lézard, mâchant avant de recracher les petits os gênant vers le feu.
Il était installé dans les décombres d’un bâtiment, avec une petite vue vers l’ouest, pour voir le soleil couchant. Mais à présent qu’il avait déjà disparu depuis quelque temps, le ciel s’assombrissait très rapidement. Rell continuait de remonter vers le nord du mieux qu’il pouvait, et plusieurs jours étaient passés depuis sa précédente rencontre avec le troqueur.
Il se débarrassa du reste immangeable du lézard dans le feu et fini son cactus, un peu fibreux mais riche en eau.

Un faible bruit lui fit lever la tête. C’était lointain mais il tendit l’oreille en se figeant. Dans le silence de la nuit, il n’eu pas de mal à rapidement identifier au fur et à mesure que ça s’approchait, c’était des bruits de moteurs. Il se leva précipitamment et jeta avec ses bottes des gravas et poussières sur le feu pour l’éteindre, amenant l’obscurité autour de lui. Tapotant encore un peu dessus pour finir, il sorti prudemment du bâtiment pour jeter un coup d’œil. Au milieu des ruines il n’avait vu sur rien, il traversa alors deux rues et tourna la tête à un coin de mur. De là il avait une vue sur la plaine environnante. Au fond trois spots lumineux avançaient en file dans une direction commune. Un quatrième au dessus de celui au centre balayait le désert autour d’eux. Trois machines… Ce ne pouvait pas être un troqueur itinérant, c’était des chevaucheurs de métal.
Il se rappela les paroles de Norim :
- « Le meilleur moyen de les éviter c’est de ne pas être vu, donc te planter comme un poireau à attendre en plein milieu comme ça, plus jamais hein ? »
Rell disparu derrière le coin de mur et se remis à courir vers son repaire. Les bruits de moteur pétaradant résonnaient dans le noir et semblaient s’approcher.
Revenu dans son immeuble, il camoufla un peu plus les restes du foyer avec d’autres gravas et ramassa toutes ses affaires.
Il s’enfonça dans la cité poussiéreuse en avançant par bond, s’assurant que rien n’était visible avant de courir vers un point, puis refaire un visuel avant de bouger à nouveau. Arrivé à une intersection, un faisceau de phare balaya la rue perpendiculaire à la sienne brièvement, il se stoppa et attendit que la lumière disparu avant de jeter un coup d’œil. Comme plus rien n’était visible, il traversa la rue et poursuivit sa route.
Il choisi un bâtiment un peu plus haut et rentra à l’intérieur, s’arrangeant pour essayer de ne pas laisser trop de traces en entrant, sautant sur les blocs de béton écroulés plutôt que marchant dans la poussière. Il entendait toujours les bruits menaçant non loin sans pouvoir les localiser précisément avec l’écho des murs, ou peut être tournaient-ils vraiment autour. Ainsi ils chassaient la nuit ?
Il rampa après un temps vers une ouverture de l’immeuble, il était à quelques étages à présent, et pouvait voir les ruines avec hauteur. Il aperçu les phares des engins, sans rien distinguer d’autres dans le noir absolu, la lune était mince et basse et n’offrait qu’à peine une vue des silhouettes des immeubles environnant. Les chevaucheurs s’éloignaient, ils étaient passés en périphérie des ruines sans y faire étape, et après un rapide coup d’œil autour ils s’en étaient désintéressés.
Ord-Rell attendit un moment qu’ils disparaissent avant de se redresser et se remettre en route.

*
* *




La nuit était bien avancée et sa marche l’avait conduit dans une forêt pétrifiée, dont il ne restait guère plus que des troncs morts, des herbes sèches et une mince couche d’humus que les tempêtes n’avaient pas encore complètement soufflé. Les craquements du bois sous le vent le suivaient alors qu’il progressait à bon rythme. Ord-Rell leva les yeux vers les branches dénudées pour apercevoir le fragment de lune. Le hurlement saccadé d’un coyote lui fit tourner la tête. En échos un second hurlement répondit dans une autre direction. Rell avait souvent rencontré des coyotes, mais pas en meute. Il fronça les sourcils et continua d’écouter, d’autres hurlements d’alerte suivirent.

Cette fois ce serai différent des chevaucheurs. Il ne suffisait pas de se cacher, les coyotes traquaient au flair, et ça il n’était pas en mesure de l’atténuer. Il soupira, prit sa lance en main et se mit à courir entre les troncs. Il n’avait pas spécialement d’objectif, il souhaitait juste gagner un peu d’avance le temps de réfléchir. Qu’importe où il pouvait aller, peut être qu’il tomberai sur un endroit plus propice pour se battre. Mais il n’avait aucune idée de quoi exactement. Un silence pesant seulement troublé par ses pas, que venait parfois couper un hurlement, toujours plus proche.

Courant entre les troncs, il fini par rejoindre le ru qui serpentait au milieu des restes de forêt. Il s’arrêta un instant pour réfléchir puis se dirigea vers un arbre. Ouvrant son pantalon, il se mit à uriner sur le tronc largement. S’arrêtant alors qu’un nouvel hurlement retentissait, il reprit la route vers le ru et une fois rejoins il marcha franchement dans l’eau pour avancer vers l’amont. Il avait espéré placer une odeur à un endroit et camoufler la suite de ses traces avec l’eau. Il doutait que la ruse ne dure bien longtemps, mais ça ferai gagner du temps.
Ses bottes étaient trempées à présent ainsi que le bas de ses chausses mais ça n’avait guère d’importance. Il faisait surtout attention à son environnement. Et depuis plusieurs minutes il n’entendait plus de hurlements. Peut être était-ce un bon signe. Ord-Rell sorti du ru et secoua un peu ses bottes pour retirer l’excès d’eau.

Il s’enfonça à nouveau prudemment dans la forêt décharnée, sa lance à la main. Le silence assourdissant lui permis d’entendre le petit craquement sur sa droite. Pivotant rapidement, il vit l’ombre d’une bête charger vers lui. Il n’eu que quelques secondes pour réagir. Plantant la hampe de la lance en appuis sur le sol, il la pencha en oblique vers l’avant devant lui. Quand le coyote bondit sur lui en grondant, il essaya de déplacer rapidement la pointe sur sa trajectoire. Dans l’impossibilité de changer son saut, l’animal s’empala sur la lance verrouillée contre le sol de par son propre poids qui la percutait. Les mâchoires claquèrent non loin de la tête de Rell alors que l’animal exhalait un dernier souffle. Il laissa tomber la lance au sol à cause de la masse de l’animal et la retira promptement du corps. Ainsi ils l’avaient quand même trouvé… D’autres ne devaient pas être loin.
Il pivota doucement sur lui-même pour observer l’obscurité. Les doigts nus et noirs des troncs montaient, squelettiques, sur le fond du ciel étoilé. Rell tendit l’oreille mais les coyotes étaient terriblement discrets. Il n’entendit pas la seconde vague, quand il s’en rendit compte c’était trop tard. Trois coyotes avaient surgit d’un coup pour se ruer sur lui. Ord-Rell fit tournoyer sa lance mais ne pu qu’en blesser à peine un des assaillants. Il tomba au sol sur le dos, et pris sa lance à deux mains pour retenir les mâchoires d’un des animaux qui s’échinaient dessus. Les autres attaquèrent ses habits et ses chausses. Les bêtes déchaînées n’étaient pas spécialement énorme, des coyotes d’une vingtaine de kilo, mais la position délicate dans laquelle il se trouvait n’était pas à son avantage.
Il lâcha la lance d’une main, pour aller chercher son couteau à sa ceinture. D’un coup ferme, il planta la lame dans le ventre de l’animal qui le surplombait et appliqua un mouvement de lacération pour l’éventrer. Couinant et grognant, le coyote pu être repoussé, mais les deux autres étaient toujours sur lui. Rell hurla quand sa jambe fut croquée franchement par un des coyotes. Il senti le froid humide du sang envahir le tissus de son pantalon. Il agita la lance vers l’animal pour lui faire lâcher prise et réussi à lui blesser le museau sans plus. Saisissant une occasion où les deux se repositionnaient pour juger leur proie avant de revenir à l'attaque, Rell se redressa en se servant de sa lance comme béquille. Il sentait la sueur tremper sa chemise, et les gouttes perler sur son front. Sa jambe lui lançait affreusement, mais c’était mieux de dominer l’ennemi.
Il continua de faire mouliner sa lame pour les retenir mais chercha une solution de repli. Voyant un tronc non loin, il se recula prudemment vers celui-ci, tenant les coyotes à distance. Eux aussi étaient plus prudents à présent et n’osaient pas se confronter à la lance directement. Arrivé au pied du tronc, il se délesta de son sac, et de sa lance, ne gardant que son fusil en bandoulière. Il sauta pour attraper une grosse branche et se hisser, s’aidant de sa jambe valide. Les coyotes n’attendirent pas et bondirent, l’un deux s’accrochant encore à son pantalon qui se déchira. Rell grogna et vit qu’il n’était pas encore tout à fait hors de portée. Se tenant comme il pouvait au tronc, soufflant sous l’élancement de sa jambe, il serra les dents et entrepris de grimper encore d’un cran. Dans le même temps deux autres coyotes déboulèrent de la nuit et encerclèrent le tronc, poussant des soufflements brefs agressifs. L’un des autres était déjà en train de fouiller le sac, de mordre dedans et le secouer dans tous les sens. Ses affaires se dispersèrent aux alentours et les coyotes dévorèrent tout ce qui était comestible.

Rell s’assis sur une branche qui craqua légèrement. Il espéra qu’elle tienne le coup. Il prit alors son fusil lance-lime et l’arma avant de l’épauler. S’il ne se débarrassait pas proprement de tous, là maintenant, il allait être coincé sur son arbre. Les deux chargeurs étaient enchâssés dans le fusil, lui donnant huit tirs maximum.
Grimaçant à cause de la douleur de sa jambe, il tâcha de viser un premier coyote qui était en train de manger ses rations tirées du sac. Bloquant sa respiration brièvement, il appuya sur la gâchette, la lime pointue filant silencieusement vers l’animal pour se planter dans son flanc. Celui-ci couina de douleur et s’effondra sur le sol en gémissant. Les autres coyotes sursautèrent et s’agitèrent pour chercher d’où venait l’agression. Ils ne l’avaient pas oublié non plus, deux d’entre eux s’acharnant régulièrement à sauter en bas du tronc pour essayer de l’attraper.
Laissant l’agonisant de coté, il visa un de ceux qui bondissaient sous lui. C’était compliqué vu qu’ils n’arrêtaient pas de bouger. Le premier tir de lime fini dans le sol. Le second fut plus efficace et il pu toucher un poitrail alors que l’animal était dressé sur deux pattes arrières, celles d’avant sur le tronc.
Les deux coyotes restant se firent plus prudent, mais l’appel de la faim était plus fort. Les tirs suivant furent peu fructueux. Cette fois ci les coyotes bondissaient d’un coté et l’autre, et l’une après l’autre, les limes se plantaient dans la terre. Rell avait beau maugréer, il n’arrivait pas à les abattre et il n’aurai pas assez de limes à cette allure. Foutu pour foutu, il laissa pendre plus bas sa jambe blessée en guise d’appât. Le sang dégoûtait sur le sol en dessous et les coyotes revinrent immédiatement pour bondir et essayer de la chopper. Il gardait juste assez de distance pour être juste au dessus des sauts, bien qu’il n’était pas certain que sur un coup de chance, les bêtes ne puissent l’avoir. Mais ça lui offrit l’ouverture qu’il avait besoin. La lime cueilli le coyote en plein vol dans la gueule béante qu’il ouvrait pour mordre. L’animal s’effondra au sol immédiatement et ne bougea plus. Ce fut assez pour le dernier qui ne demanda pas son reste et s’enfuit.

Reposant son fusil sur les genoux, Rell ferma les yeux et tenta de récupérer. Sa jambe l’élançait affreusement, il fallait qu’il fasse quelque chose où le désert aurait raison de lui à défaut des coyotes.
Il attendit tout de même quelques minutes avant de se redresser de sa position de repos, et tenta de descendre doucement. Avec sa jambe douloureuse, il manqua un appui et s’effondra au sol sur le dos en une belle chute. Il hurla de douleur et écarta les bras en croix, à bout de souffle, il ferma les yeux et essaya de se reprendre. Au bout de longue seconde il se força à se redresser en position assise et inspecta sa jambe.
Tout le bas du pantalon à partir du genou était déchiré. En dessous, des traces de crocs marquaient sa chair et le sang dégoulinait. Il rampa vers ses affaires éparpillées pour prendre une gourde et entama le nettoyage des plaies. Pas très utile vu que le sang recommençait à sourdre immédiatement. Il se saisi alors de son couteau pour déchirer l’autre jambe de son pantalon, et utilisa le tissus pour se faire un bandage serré. Il grogna de douleur et ne se senti pas capable de remarcher tout de suite. Il se sentait déjà épuisé et prit donc une longue pause pour essayer de se remettre. Mais il savait qu’il devait bouger. Rester immobile ne l’amènerai à rien. Attendre la journée serai pire. Espérer que la chance le guérirai était utopique. Il devait partir oui. Retrouver un abri, un endroit pour prendre du repos, voir si possible retrouver un troqueur qui lui permettrai d’avoir de quoi se soigner.

Ord-Rell se redressa péniblement dans le noir, ramassant ses affaires qu’il fourra dans son sac délabré et récupéra les limes au sol ou sur les cadavres. Ne sachant s'il serait en mesure de chasser il en profita pour récupérer un peu de viande de coyote. Puis, utilisant sa lance comme béquille à présent, il reprit une marche lente, décidé, mais sans grand espoir.
Ordrell
Survivaliste

Dans le ventre du Lion - Partie I



De nos jours…
Cybertown défilait doucement à travers la vitre. Assis sur le siège moyennement confortable, Ord-Rell observait le paysage, balancé par le roulis du train et accompagné du clac-clac des roues sur les voies ferrées. Qui aurait pensé qu’il verrai un train en état de marche un jour.
Partant au travail pour finir les aménagements des gares, il pensa en regardant l’intérieur de là où il était, qu’une autre histoire avait commencé dans un wagon similaire, ou presque. Se penchant sur son sac, il plongea la main et en sorti une bombe de peinture rouge qu’il remua doucement. Un petit sourire en coin effleura ses lèvres.


Même si le rapport avec l’individu rencontré au hasard des voyages est important pour la survie, il faut également se poser la question de la confiance à lui apporter. On ne peut jamais savoir à l’avance sur quel genre de personne on tombe. Et je vous le dis, certain ne sont vraiment pas net du tout dans le désert…
Alors on peut choisir de rester ouvert à tout le monde, jusqu’au moment où on se fait avoir. Ou bien être méfiant, voir agressif, avant de clarifier la situation. Ou encore de fuir et d’éviter le plus possible les rencontres, mais comme je l’ai dit l’autarcie n’est pas viable sur la longue durée. La simple prudence peut suffire, avec une phase d’espionnage à établir avant le contact pour savoir à qui on à affaire.
Chacun sa méthode, et la situation peut également influer sur les choix à faire. Dans tous les cas, les rencontres sont toujours relativement délicates.



- Putain fait chier…
Une énième fois Ord-Rell s’arrêta à cause de la douleur à sa jambe. Il était au supplice depuis trop longtemps et avançait bien plus lentement que d’habitude.
Chaque pas lançait sa jambe et son pansement provisoire était rouge sombre. Il sentait la fièvre monter, d’autant plus sous le soleil de plomb qui n’aidait en rien. Il n’avait encore rencontré personne et même alors il était trop vulnérable pour s’afficher auprès de n’importe qui.
Il reprit la route doucement, clopinant sur sa béquille. Il avait trouvé un bâton en fourche qui faisait mieux l’affaire que sa lance pour l’aider, lui permettant de poser l’aisselle dans le creux. Son sac déchiré, la sueur de sa fièvre sur son front, et boitant dans le désert, il semblait pitoyable.

Mais depuis le temps qu’il marchait, il avait rejoint les faubourgs d’une agglomération. Il n’en subsistait pas grand-chose, et pour le peu qu’il voyait au loin, ça semblait encore pire, victime directe du grand flash. Les ruines éclatées ne montrait que des bribes de bâtiments soufflés et brûlés, avec entre eux des monticules de débris. Aucune plante, aucun souffle de vent, l’endroit était sinistre et n’était guère accueillant.
Néanmoins il s’y aventura tout de même alors que le soleil déclinait. Norim le troqueur lui avait parlé de survivants, mais il ne savait pas encore comment se comporter vis-à-vis de cela.
Il suivit une rue, encombrée de gravas, encadré par des immeubles quasiment tous effondrés. Sur un mur, un graffiti rouge fait à la bombe et au pochoir représentait une tête de lion rugissant. La tribu du lion… Ainsi il entrait sur leur territoire. Rell s’arrêta un instant, considérant le graffiti et observa alentour. Tout était calme, sans aucun bruit. Il poussa un soupire et reprit son clopinement en grimaçant.

Combien étaient-ils ? Est-ce qu’ils l’aideraient ou le dépouilleraient ? Leur comportement dépendrai de lui avait dit le troqueur, mais il voulait dire quoi par là ? Comment devait-il se comporter en fait ? Il hésita à crier pour appeler mais se retint, toujours prit dans le doute et les tourments de la fièvre. Il tangua un moment et vint se soutenir à un mur. Un bourdonnement lui rempli les oreilles. Il devenait dingue, complètement à bout. Il secoua la tête, se boucha les oreilles, et réalisa que le bourdonnement était réel. Il retira ses mains et regarda autour de lui. Il s’agissait d’un petit vrombissement relativement régulier mais qui ne provenait pas d’une zone qu’il avait en visuel.

Il tourna la tête au coin du mur et vit de quoi il s’agissait. Un petit appareil flottait dans les airs grâce à un ballon de forme allongée et d’environ deux mètres de long, poussé par des petites hélices qui provoquaient le bourdonnement. Il progressait doucement, balayant la zone avec des petits appareils disposés dessous et ses phares qui ressemblaient à des yeux scrutateurs. Un long câble épais entouré d’autres fils partait de l’engin pour rejoindre un endroit caché dans les ruines, et pulsait régulièrement comme une artère qui amenait du sang. Des petits jets de vapeur s’échappaient en rythme lent des micro-machineries sous le ballon, comme des soupires mécaniques.



Rell regarda quelques secondes abasourdit pendant que l’engin pivotait doucement, braquant ses yeux lumineux vers lui. Reprenant ses esprits, il se cacha immédiatement derrière le mur. Il se prit d’une crainte, peut être irrationnelle, mais il lui semblait qu’un groupe si équipé et possessif dans ses terres pouvait représenter une menace. D’autant plus pour un blessé faible comme lui. Que pouvait-il donc faire ? Supplier de l’aide ? Mais au nom de quoi l’aideraient-ils. Peut être même était-ce un camp de chevaucheurs de métal. Norim n’en avait rien dit de précis.

Ord-Rell tenta de s’éloigner rapidement comme il pu, tourna à divers angles de restes de bâtiments, cherchant à fuir. Les vrombissements discret étaient toujours présent non loin. En se collant au mur, au moins espérait-il échapper aux champs de vision. D’un bref coup d’œil à un croisement, il vit la machine flotter à quelques dizaines de mètres sans regarder vers lui. Il fit demi-tour et s’engagea dans une ruelle, tapotant de sa béquille sur le sol à chaque pas. Il manqua de tomber quand du bout de la rue, un autre ballon scrutateur apparu et pivota dans sa direction, son câble pendant à l’arrière. Vainement, agacé, il ramassa une pierre pour lui lancer et fit demi-tour. Combien de ces machines parcouraient le ciel de ces ruines ? Il ne pourrai pas les fuir, pas dans ses conditions physique. Le hasard de sa fuite le mena à une petite cour, mais c’était un cul de sac. Rien n’était assez debout pour espérer se cacher en intérieur. Par contre à quelques mètres il vit une plaque d’égout ouverte. S’approchant, il jeta un coup d’œil dedans. C’était sombre, mais l’échelle d’accès avait l’air en état correct. Peut être qu’il pourrai arriver à traverser la zone sans être vu en passant sous le sol, hors de vue des machines.

Le vrombissement s’approchant, Rell ne traîna pas plus et s’engagea difficilement dans l’ouverture à cause de sa jambe blessée. Il s’aida surtout de ses bras, et laissa pendre sa jambe morte. Une fois au sol en bas dans le petit cercle de lumière, il tourna la tête à droite puis à gauche. Le collecteur filait droit dans les deux directions et se perdait dans le noir.
Il avança de quelques pas vers la droite et s’arrêta. Tout était obscure au-delà, il n’irai pas loin. Râlant quelque peu, il saisi son briquet et s’échina a essayer d’embraser le bout de bois sec de ce qui lui servait de béquille. Au bout de plusieurs essai, il fini par obtenir une petite flamme qui consumait lentement le bout de bois. Aidé de cette maigre lumière, il avança courbé cahin-caha dans le petit tunnel.

Le sol était sec, l’eau ne circulait plus ici depuis des lustres. Des débris et vestiges de déchets jonchait le béton sous ses pas. Il ne prit pas le temps de fouiller parmi eux, et continua lentement sa route. Arrivé à un embranchement, il s’arrêta pour regarder, alors que le couloir se séparait en Y. Il n’avait strictement aucune idée d’où aller. Un puits de lumière semblant filtrer au loin à droite, comme une autre bouche ouverte, il choisi cette direction. D’autres tuyaux s’embranchaient sur son collecteur, mais trop petit pour être empruntable, sauf peut être par des rats.
Soufflant sous la douleur, clopin-clopant, il arriva sous le puits de lumière et leva les yeux. Le ciel de fin de journée était orangé et aucun bruit de moteur ne se faisait entendre. Quand un clac suspect résonna dans les tunnels il abaissa immédiatement la tête et regarda devant lui. Mais rien ne paraissait plus obscur que ce qui était hors de son puits de lumière. Tentant vainement de tendre son bâton enflammé devant lui, il scruta les ténèbres en vain. Il fut surprit quand on le frappa à la tête par derrière. Poussant une exclamation, il s’effondra au sol. Les yeux troublés il vit une chaussure se poser devant lui, puis ce fut le noir.

*
* *


La douleur lancinante le réveilla. Il se senti allongé sur un sol froid, métallique. Grognant, Ord-Rell fit mine de bouger mais se rendit compte qu’il avait les pieds liés, et les mains de même dans le bas de son dos. Il avait beau ouvrir les yeux, il ne voyait rien, il avait un bandeau par dessus. Continuant de grommeler, il essaya de se débattre un bref instant en vain.
- Il se réveille.
La voix était masculine. Il n’entendit pas de réponse, mais des pas s’approchèrent en claquant sur le métal. On le saisi par son manteau pour le redresser brusquement assit, ce qui ne ménagea pas sa blessure et le fit grimacer.
- Hey étranger !
C’était la même voix, qui poursuivit tout en le maintenant.
- Tu n’es pas en bon état, alors tu as le choix. Ou tu réponds à nos questions, ou on te laisse croupir ici où tu vas crever lentement.
Rell baragouina quelque chose mais il n’avait pas vraiment la force, il serra les dents. L’autre continua après l’avoir relâché.
- Qui es-tu ?
Les pas marchaient autour de lui, Rell souffla pour supporter son état mais ne répondit pas.
- Que viens-tu faire ici ?
Il ne bougea plus et fit le mort, que l’autre aille se faire voir.
- Y a-t-il encore autre chose sur toi que tu nous cache ?
Rell ne doutait pas d’avoir déjà été fouillé mais il parla néanmoins d’une voix enrouée en prenant son temps.
- Hm… Ouai… Rgardes dans mon dos…
L’autre ne bougea pas un petit instant puis se décida à aller jeter un coup d’œil tout de même. Se positionnant derrière Rell, il chercha de quoi il s’agissait pour voir son prisonnier lui faire des gestes obscènes avec ses mains liées. Rell retint un sourire, ne sachant s’il avait porté. Il le su quand l’autre lui asséna sans prévenir un coup de poing qui le renversa au sol. Il semblai furax.
- Fais pas le malin étranger !
- Ça suffit !
La nouvelle voix était celle d’une femme. Des bruits de pas, plus léger, les siens, s’approchèrent. Elle s’accroupi devant et amena un bol près de ses lèvres.
- Bois ça, ça aidera.
Ord-Rell fit mine de tourner la tête.
- Jveux pas dta merde. C’est quoi ?
- C’est pour t’aider pour ta blessure.
- Ou m’empoisonner pour mcrever ?
- On aurai eu plus simple pour te crever que t’empoisonner. Maintenant bois.
Il grimaça et se résolu à boire doucement. C’était amer sur la langue.
- C’dégueulasse ton truc…
- C’pour ton bien.
- C’pour mon bien aussi qu’vous m’attachez ? Ridicule !
- Non, ça c’est pour le notre. On va te laisser réfléchir un peu.
Elle se redressa et fit un signe silencieux. L’autre gars s’éloigna. Rell entendit le bruit d’une sorte de porte coulissante métallique grinçante. Un soupçon de lumière filtra à travers le bandeau. La femme s’éloigna à son tour, ses pas claquant sur le sol de métal. Il écouta soigneusement, et sembla reconnaitre quelques marches tout aussi métalliques après cette porte. Celle-ci grinça encore et claqua. Ord-Rell se retrouva à nouveau dans le noir.

(Illustration maison. C'est plein de défauts mais faut être indulgent c'est le premier matte painting complet de ce genre que je fais.)
Ordrell
Survivaliste

Dans le ventre du Lion - Partie II




Quand des centaines de personnes ont commencés à sortir des bunkers de survie pour explorer l’extérieur, il est normal qu’au bout d’un certain temps il y en ai qui essayent de s’installer quelque part. Je ne parle pas de Cybertown mais d’abris plus sommaire comme des camps de bric et de broc, ou des choses temporaires, voir dingue et ingénieux que certains ont réussi à bricoler. Parfois c’est réussi, parfois c’est voué à l’échec et n’est qu’une autre façon de mourir. J’en ai vu quelques un de ces camps mais aucun de ne m’a retenu assez longtemps. Faut dire je suis un baroudeur, et j’avais toujours une raison qui me forçait à m’en extraire…


Depuis combien de temps est-il là dans le noir ? Les heures paraissent tellement longues. Il pourrait être arrivé la veille ou il y a une semaine… Ses articulations sont endolories, les muscles rigides, sa jambe est toujours douloureuse. Quand la porte s’ouvre et grince en coulissant, il ne bouge pas. Des pas s’approchent en claquant sur le sol métallique. La voix du gars revient l’agresser.
- Alors tu t’es décidé à parler ?
Rell peut juste coasser une réponse.
- Vas te faire…
- On gagnerai énormément de temps tous les deux si t’acceptais juste de dire ton nom.
C’est la voix féminine de l’autre fois qui a repris la parole. Elle par contre semble moins brute, mais est-ce pour autant qu’il doit faire confiance. De toute façon garder son nom ne servirai à rien.
- Ord-Rell Kanagan. T’contente ?...
- C’est un bon début. Si jte détache que comptes-tu faire ?
- Me barrer d’ici…
Elle ricane légèrement.
- Dans l’état où tu es ? Tu n’iras pas loin.
Ord-Rell grogne car il le sait très bien, il est à bout et ne serai plus capable d’entreprendre une longue marche jusqu’à on ne sait où.
- Vous m’avez amené où ?... On… on est dans un bunker ?
Un soupçon de panique passe dans sa voix, après tout, un accès par les sous-sols, il n’a pas envie de revenir dans un bunker. Pas tout ça pour y revenir…
- Non. Ne t’en fait pas, ce n’est pas un bunker.
- Qu’est ce que c’est ? Vous êtes qui ?
- C’est nous qui posons les questions ici ! Intervint à nouveau le gars.
- Jparle pas aux raclures de bunker.
Rell cracha les mots en pensant à la mentalité brutale qui dominait souvent les instincts dans les anciens bunkers de survie. Même si lui aussi en était passé par là, pour survivre. Il l’entendit bouger mais du se faire arrêter par la femme, qui préféra reprendre l’interrogatoire.
- D’où viens tu ?
- Du sud, ya rien dans l’sud…
- Et tu te rendais où ? Poursuivit-elle.
- Au nord… C’te question… Ya… Norim, l’troqueur là, qui m’a parlé de survivants dans le coin.
- Tu connais Norim ?
- Juste croisé une fois. Il secoua la tête. Bon vous allez faire quoi ? On va rester comme ça longtemps comme des cons à se menacer pour rien ?
L’homme rit.
- Toi tu nous menace ?
- ‘tend que jsois libéré du con.
Un petit silence s’éternisa, il remua un peu mal à l’aise. Enfin la femme reprit.
- Si jte libère tu vas devoir respecter les règles d’ici.
Il grogne de mépris.
- Rien à foutre des règles, j’veux me tirer.
- Ici tout le monde agit pour l’ensemble, personne n’attaque les autres. Commença t-elle mais il l’interrompit.
- Mes fesses, vous m’avez bien frappé.
- Tu n’es pas du groupe encore. Ensuite… On ne divulgue pas ce lieu à l’extérieur, surtout pas aux chevaucheurs.
- Ça tombe bien j’en connais pas. Et jsais même pas où jsuis ! Allez arrêtes ton blabla, détaches moi.

Il l’écouta à peine quand elle débita les dernières règles, plus concentré à penser à ce qu’il allait faire après. Péter la gueule à l’autre ouai, ça lui semblait bien. Quand elle se pencha sur lui pour lui défaire les liens il ne bougea pas, pas plus quand elle retira le bandeau. Il cligna un peu des yeux pour voir la petite salle en carcasse métallique et sombre autour de lui. Pas de lampe, la lumière filtrait de l’extérieur par des petites ouvertures près du plafond. Il se regarda, il avait l’air pitoyable, et n’avait plus ses affaires autres que ses habits. La femme était habillé d’une tenue mélange de combattante et baroudeuse sexy, du moins le trouvait-il avec son pantalon brun qui moulait de petites fesses et une chemise un peu échancré qui laissait entrevoir le décolleté. Elle avait les cheveux bond coupé court, qui basculait un peu comme une vague sur le coté droit. Des yeux brun durs le scrutaient. Il jugea qu’elle devait avoir un peu moins de la trentaine. Elle l’aida à se redresser en prenant sa main, il tituba un peu, et tenta de bondir d’un coup vers le mec à coté pour le cogner. Mais plus rapide et en meilleur état que lui, la femme le faucha avec un croc-en-jambe et il s’effondra lourdement au sol en râlant.

- Je viens de dire quoi Ord-Rell ?!
- Ça va c’est bon…
- Tu vas te tenir tranquille ?
- Ouai… j’en ai ma claque.

Elle l’aida à nouveau à se lever et il ne se débattit pas cette fois. Le gars ouvrit à nouveau la porte et elle l’y guida.
Le pas hésitant et toujours douloureux, il se retint à la porte métallique et plissa les yeux un peu à la lumière. Il fit un pas sur l’escalier métallique qui menait à un sol de béton et regarda autour de lui. Ils étaient dans un grand hangar, quelque peu abimé, le toit partiellement détruit surtout à un endroit. Quelques voies ferrées courraient tout le long, pour cause, sa prison était un wagon de marchandise, isolé sur sa voie. Une voiture voyageur était disposée plus loin, des rideaux tirés, en bout de voie. Quelques personnes s’affairaient autour d’un feu mais il ne prit pas le temps de tout détailler, la femme le tira par le bras pour l’emmener. Il grommela et se tint à elle pour avancer.

- ‘tin c’est quoi ici ?

Sur le toit de taule résonnait le vacarme d’une averse. Des goûtes ou filets d’eau coulaient des trous du plafond. Il s’approcha et tendit une main pour faire mine de récolter et boire. La femme lui bougea la main et intervint :
- Je ferai pas ça à ta place. Ça rend malade de boire l’eau de pluie comme ça.
- Ha bon ? Comment faites vous pour boire alors ?
- On a un distillateur pour purifier l’eau avant.
Elle continua d’avancer vers un endroit plus sec du hangar, où étaient amassés les gens, il en vit cinq présents.
- Bref bienvenu au QG de la tribu du Lion. Moi j’m’appelle Cobalt.
- Mouai…

Autour du feu étaient disposés quelques fauteuils de train qui avaient été arrachés et posés à même le sol, en une sorte de cercle large. Les quelques personnes tournèrent la tête vers eux.
Un peu à l’écart il y avait un type assez jeune, presque un gamin, en tenue relax, t-shirt jaune, casquette rouge et blanche usée à l’envers, et un jean troué. Il était avachi dans un imbroglio de fauteuil pour faire un nid confortable. Sur les yeux il avait une visière opaque qui le coupait du monde, un câble en partant pour rejoindre un appareil, qui se connectait aussi à une manette de vieille console de jeux qu’il tenait dans les mains. Un autre câble courrait de l’appareil vers un escalier qui descendait en sous-sol. Cobalt poursuivit en le désignant.

- Lui c’est Pika, c’est pas son vrai nom mais il veut qu’on l’appelle comme ça. Là tu vois c’est lui qui pilote les Seekers.
- Les quoi ?
Le Pika en question fit un vague geste de la main pour saluer et continua de triturer sa manette.
- Les surveillants volants que t’as vu, et qui t’ont vu. C’est comme ça qu’on repère les intrus et qu’on agit en conséquence. Fuir dans les égouts… aurait pu être une bonne idée si ça n’avait pas été notre moyen de déplacement principal. On les connait bien mieux que toi, ça a été facile de te coincer.
Ord-Rell grogne de dépit et la regarde.
- Bravo vous avez capturé un homme blessé, quelle gloire…

Sortant du hangar, un autre spectacle s’offrit à ses yeux. Les voies du hangar rejoignaient une plateforme centrale circulaire, pont roulant pivotant d’une époque lointaine, d’où rayonnaient des dizaines de voies ferrées. Au milieu de la plateforme, une machine éolienne de métal et de toile tournait lentement sous la pluie. Sur leur gauche, d’autres hangars semi-ouvert s’alignaient les uns contre les autres en arc de cercle, une voie rentrant dans chaque. Une extrémité laissait cinq de ceux-ci effondrés sur les dix-neuf de l’ensemble. Sur les voies à l’air libre à droite pourrissaient quelques carcasses de vieilles locomotives. Il embrassa l’ensemble de la vue de la rotonde ferroviaire avant de clopiner, toujours entraîné par Cobalt vers les hangars en arc de cercle.
Rell désigna vaguement de la main la machine éolienne au centre.
- Vous avez l’électricité ?
- A peine. De quoi faire fonctionner les Seekers, quelques lumières et le distillateur.
- Pas mal… Qui a fabriqué tout ça ?
Elle sourit brièvement et expliqua :
- Ha… C’est Phileus. Un peu râleur mais c’était un bon ingénieur. Il a récupéré quelques pièces des locomotives qui de toute façon ne fonctionnent plus depuis des lustres. Et avec des assemblages d’autres trouvailles, il nous a pondu tout ça.
- Impressionnant. Jlui parlerai ptetr plus tard.
- Non.
Il haussa les sourcils, étonné de sa réponse directe.
- Pourquoi ?
Mais Cobalt ne répondit pas et lui désigna l’intérieur des hangars. Sur plusieurs voies étaient disposés des voitures voyageur. Les vitres étaient pour la plupart brisées mais on avait remplacé par des planches ou des rideaux épais. Il en compta huit. Une neuvième étaient à demi ensevelie et écrasée sous les décombres en bout de hangar et ne devait pas servir. En marchant il observa un mur qui portait une inscription de l’ancien nom du lieu à demi effacé et recouvert de la marque rouge de la tribu à la bombe de peinture.



Elle le guida jusqu’à une des voitures et grimpa le marchepied pour rentrer en l’aidant.
- Bon… Celui là a été vidé il y a deux semaines, ses occupants étant parti.
- Ha ? Comment ça ?
- En fait ici des gens vont et viennent. Nous sommes peu à être installés depuis le début, en tout cas ya moi, Pika, Pol, Deren et…
Mais elle s'arrêta.
- Et ? C’est qui Pol, et Deren ?
- Deren c’est le gars que tu as voulu cogner dans le wagon. Pol notre cuisinier, tu as du l’apercevoir près du feu. Chemise grise, une barbe brune dense.
Il chercha dans sa mémoire les silhouettes vues rapidement et opina. Il inspecta l’intérieur du wagon, une bonne partie des sièges avait été retirée pour faire de la place, on avait rajouté divers objets et petits mobiliers trouvés dehors. C’était sommaire mais malgré tout de loin le meilleur campement qu’il ai connu. Cobalt reprit :
- Ça peut être ton wagon le temps que tu restes là.
- Quoi, tout ça ?
- Si tu le souhaites… Bienvenue dans la tribu du Lion.
- Mouai… merci, m’enfin j’ai rien demandé… De toute façon faut que jme repose un temps pour ma jambe…
- Et tu devras boire mon breuvage dégueulasse pour guérir !
Il grogna pour la peine et s’installa sur un fauteuil de train et soufflant.
- Je vais me reposer un peu. Vous avez une drôle de façon de souhaiter la bienvenue aux gens en les enfermant dans un wagon…
- On doit prendre quelques précautions pour savoir à qui on à affaire. On peut pas se permettre que ce lieu soit découvert par les chevaucheurs de métal.
- Et si j’en avais été un ? demanda t-il en tournant à nouveau la tête vers elle.
- Tu serai mort. Mais ils ne peuvent pas accéder directement au QG, la disposition des ruines autour fait qu’il n’y a pas de place pour faire passer leurs engins. On est dans une niche enclavée, accessible que par le sous-sol.
Rell opina et appuya sa tête sur le dossier, fermant les yeux.
- Ouai… bon jpasserai plus tard.
Il n’était même pas sur de l’avoir entendu sortir, il sombra rapidement dans le sommeil.

*
* *


Quand il se réveilla il faisait sombre. Rell regarda un peu autour de lui, un instant désorienté avant de se souvenir qu’il était dans un wagon posé dans une vieille rotonde abandonnée. Il se redressa et chercha sa béquille des yeux. Il vit qu’on lui avait apporté une barre de fer qui pouvait faire office de. Il la saisi et s’avança vers la sortie, descendant prudemment de la voiture voyageur. L’endroit était calme, même en passant proche des autres voitures ferroviaires dont il fit rapidement le tour. L’odeur de fumet qui atteignait ses narines lui apprit que ça devait être l’heure de manger, et son ventre gargouillant lui apprit qu’il avait très faim.
Il retourna à l’autre hangar, la pluie avait cessée mais le ciel était toujours sombre. Quand il entra, le cercle de sièges autour du feu était presque plein, un peu moins d’une dizaine de personnes à la volée. Cobalt sortait de la voiture voyageur isolée et se dirigeait vers eux. Une marmite était au feu, pleine de quelque chose qui attisait la faim. Il s’approcha en clopinant comme un pirate, la béquille métallique claquant sur le sol et attirant quelques regards vers lui ce qui l’agaça.

- Quoi ! Vous avez jamais vu un blessé ? J’ai droit à une part ?
Cobalt les rejoins à ce moment et lui répondit.
- Bien sur. Pol tu peux lui donner un bol ?
- Sur, répondit l’intéressé alors qu’il remplissait à la louche un bol avant de le tendre à Ord-Rell avec une cuillère.
Celui-ci s’en saisi et alla se mettre un peu à l’écart. Il ne voulait pas être dans leur cercle débile, alors qu’il ne les connaissait pas. Il les garda à l’œil tout en mangeant sa bolée, qui n’était pas mauvaise d’ailleurs. Ils discutaient simplement, demandant des nouvelles sur la santé de quelqu’un mais ce n’était pas de lui qu’on parlait, des projets pour le lendemain, d’une sortie en centre-ville, de la réparation d’un tuyau de l’alimentateur éolien… Il grogna, ça changeai de ses soirées en solitaire et silencieuses et ils commençaient à lui prendre la tête.
Il se releva sans mot dire et s’éloigna comme il pu avec son bol, rejoignant l’extérieur.
Là il prit le temps de regarder un peu et se dirigea en plein centre, sur l’ancien pont pivotant, juste à coté de la machine éolienne qui tournait doucement. Il s’assit en soupirant et reprit sa consommation de nourriture. Tout était à l’ombre ici, et d’autant plus avec les nuages, il ne vit pas le soleil se coucher. Il resta néanmoins dans la lumière déclinante et posa son bol à coté de lui une fois vide.

- T’es du genre solitaire non ?
Il sursauta et tourna la tête. Une femme s’était approchée et il ne l’avait même pas entendu. Elle avait peut être quelques années de plus que lui. Assez en chair, mais sans trop d’excès, il devinait surtout une certaine force là-dessous. Elle avait une tenue simple et ample dans les tons beiges qui laissait deviner dessous une poitrine qui n’avait rien à jalouser, ainsi qu’un pantalon qui moulait ses hanches larges. Une machette était accrochée à la ceinture dans un fourreau. Ses yeux étaient gris dans la pénombre et une large tache brune marquait sa joue gauche.
Il soupira et lui répondit.
- Et alors ?
- Alors rien.
Néanmoins elle vint s’asseoir avant de continuer.
- Jm’appelle Ophélie. Je ne suis pas arrivée ici depuis très longtemps non plus tu sais. Et toi c’est ?
Comme elle forçait la conversation il fut obligé de répondre.
- Ord-Rell. On m’a gentiment invité en m’enfermant dans un wagon. Vous êtes super cool dit donc.
- T’as pas eu de chance, mais peut être si tu avais un air plus sympathique tu inspirerais moins la méfiance.
- C’est de ma faute maintenant. C’qui faut pas entendre. Ouai je suis une grande menace, avec ma guibole pétée !
- Faut pas leur en vouloir d’essayer de préserver ce petit havre. C’est plutôt rare tu sais.
- Hm me doute.
Elle garda le silence un moment en le regardant, il s’en senti de plus en plus gêné d’être dévisagé ainsi. Mais elle reprit la parole finalement.
- Pourquoi tu n’es pas resté manger avec nous ?
- Pourquoi le ferai-je ? Jvous connais pas. Faudrai que jvienne m’asseoir dans votre cercle à la con, hey salut les potes ?
- Soit pas si négatif… je voyage seule aussi. Mais je ne suis pas mécontente d’avoir trouvé un peu de compagnie.
- Hm…
- Ça fait des mois que je bouge à droite à gauche. C’est la première fois que je vois un endroit où me caler quelques temps, peut être même resterai-je.
Il haussa les épaules. Elle le scruta encore comme si elle lisait en lui, le mettant mal à l’aise. Elle souffla à voix basse quelques mots.
- Pourquoi tu es si taciturne ? Qu’as-tu donc traversé pour en arriver là…
Il secoua la tête.
- Si seulement je le savais de manière si simple…
- Si tu as besoin de parler viens m’voir Ord.
- J’ai rien à dire… répondit-il en grommelant.
- On a tous quelque chose à dire.

Elle se leva en souriant légèrement et le laissa tranquille.
Il commençait à faire noir, aussi se leva t-il pour rejoindre son wagon. Il hésita un temps sur les différents wagons avant de se rappeler que le sien avait une bande bleu sur le flanc. Il ne souhaitait que se reposer. Il grimpa les marches doucement et referma la porte derrière lui.
Ordrell
Survivaliste

Une petite balade - part I



De nos jours.
Mox 05 Junar.
Je ne suis pas un prisonnier qu’on maintient en cage. Je ne suis pas un cobaye.
Ord-Rell rumine des pensées depuis la veille au soir où il a apprit de mauvaises nouvelles. La nuit a été agitée. Déjà qu’après près de deux mois, il avait envie de sortir. A présent c’était vital. Il devait prendre l’air, bouger, et voir si c’était vrai.

Au matin il remue tout chez lui, assemble ses affaires pour faire un paquetage complet. Il a survécu au désert des années, il survivra bien quelques jours avec toutes les ressources que peuvent lui donner la ville. Il s’est réassemblé une lance comme avant, plus à l’aise avec pour se battre, si besoin est. Mais il a prit également une machette qu’il garde à sa ceinture. Son matos pour faire des lingots il l’embarque pour prévoir le bivouac. Il emporte un carré de toile large pour l’abriter, et une pelle pour creuser son trou de souris s’il faut se protéger. Il a récupéré des planches de stock des barrières de la serre pour avoir du bois avec soi. Et bien sur il doit prévoir de la nourriture.
Allant vers la sortie de son immeuble, il s’arrête brièvement devant une de ses caméras, et puisque Ils les surveillent tous, il leur fait un gros doigt bien visible en levant le bras et sort de chez lui.
Rell passe alors par la Fin du monde afin de charger le reste de place de bouffe et de boisson. Il croise peut être quelques personnes mais ne s’arrête pas, décidé, les dents serrés, il part droit vers la sortie de la ville.

*
* *


Le temps n’est pas idéal, le ciel est couvert, les averses alternent avec un roulement orageux qui résonne dans le désert. Mais au moins, il ne crèvera pas trop de chaud. Il se tourne pour regarder au loin la ville, il la voit encore mais s’en détourne vite. Il plante sa lance au sol et se frotte un peu les mains. Il lève un peu la tête en signe de défi qu’on lui a lancé. On verra bien jusqu’où il pourra aller. Il a encore la rage et quelques insultes bien senties tournent dans sa tête, dirigées vers il ne sait qui exactement.
Gardant la ligne droite pour ne pas se désorienter et reprend la marche.
Ordrell
Survivaliste

Une petite balade - part II



Joule 06 Junar
Le mauvais temps s’est levé. Rell marche sous un vent sec qui rafraîchi légèrement. Il est parti assez tard ce matin, la cause à une piqûre douloureuse de scorpion en pleine nuit, qui s’est glissé sous sa couverture. Maintenant que la douleur est passée, il peut remarcher d’un bon pas. Il avait atteint ce « bord » la veille au soir. Frustré et la tête douloureuse il avait renoncé à continué droit devant et changé de stratégie, sortant le bout de papier où il avait griffonné un plan pour faire une annotation. Il avait rebroussé légèrement chemin afin de se sentir mieux pour dormir. Pour le départ il n’était pas question de reprendre le même chemin, ni de rentrer pour autant. Il s’orienta avec le soleil, plantant sa lance droite au sol et avisant l’ombre, tout en sachant la période de l’année. Il avait l’habitude à présent, depuis des années d’errance, selon l’angle de l’ombre de deviner approximativement les points cardinaux, sans boussole, qu’il n’avait pas vu en ville de toute façon. Rell remonta vers le nord, il allait commencer la grande boucle, s’approchant de la limite supportable.

*
* *


La lance fila en l’air et transperça le crâne. Ils étaient trop faibles ici… Trop facile à combattre.
Rell revint vers sa cible et retira la pointe du coyote. Un petit encas ne ferai pas de mal, et même s’il avait en stock de la nourriture de la ville, ça faisait longtemps qu’il n’avait pas fait à l’ancienne un petit steak de coyote grillé. Il valait mieux garder des provisions… toujours au cas où…
Il déploya son bivouac et délita une planche qu’il avait emportée. Avisant autour de lui, il rejoignit un virevoltant qui n’avait pas encore quitté son pied et donc ne s’était pas encore mit à rouler à travers le désert, ce n’était pas la saison. Il le trancha avec sa machette et apporta la plante qu’il coupa en petit bout pour s’en servir de premier combustible. Avec son briquet et un petit jet d’essence il lança le feu puis se mit à découper l’animal mort.
Peu de temps plus tard, dans le silence complet qu’il appréciait, il profita du sifflement de la viande qui grille et de son fumet, la maintenant au dessus du feu avec son fer de lance.
Il tenta d’ignorer le petit mal de crâne constant qui le taraudait. Il fallait tenir.

Ordrell
Survivaliste

Une petite balade - part III



Voxel 07 junar
Hmm bénies soient les pizzas…
Ok s’il y avait un avantage à la ville c’était bien ces pizzas. Il mangeait une part pour essayer de se donner un peu de réconfort alors qu’il avait l’impression que sa tête allait exploser. Mais il persistait malgré tout. D’une part simplement parce qu’il avait dit qu’il le ferai. Mais aussi car plus il voit qu’il n’y a pas d’échappatoire, plus il a la rage qui le maintient debout.
Il avait beau envoyer quelques com de temps à autre mais la distance semblait brouiller son signal, du coup ils comprenaient rien.
Il se lécha les doigts après avoir fini sa pizza et se remis en route lentement. Affreux comme ce marteau-piqueur dans le crâne pouvait saper la force, alors que la sortie en soit n’avait rien d’autre de compliqué. Mais ça ne pouvait pas être pire que devoir fuir en courant dans le désert avec des Chevaucheurs aux trousses qui vont plus vite et sont mieux armés. Est-ce que c’était pire ? Il grimaça et se posa une main sur sa tempe, appuyant vainement. L’espace sauvage avait peut être ses désavantages et difficultés nombreuses, mais aussi c’était plein de jolies choses quand on savait regarder. Maintenant il ne devait plus rien voir d’autre que cette ville ? Quelle tristesse…
Il s’arrêta, jura et ramassa une pierre pour la lancer au loin. En voilà une qui irai plus loin que lui.
Il leva les yeux brièvement vers le soleil, puis sur l’ombre de sa lance qu’il mit droite. Il estima qu’il avait presque fait le tour, il devrai bientôt renoncer et rentrer. Il s’appuya un instant sur sa lance et regarda le sol. Puis une voix lui revint en tête, remontée d’on ne sait où ni quand. Le souvenir le submergea.

Il était étalé dans la boue, sa tenue sale. Il pleuvait dru et des cris divers du camp se faisaient entendre autour. Une voix dure l’interpela alors que les pas claquant dans les flaques approchaient.
- Kanagan ! Kanagan bon sang à quoi vous jouez espèce de bon à rien ! Vous croyez être venu ici pour barboter pendant que les autres travaillent ?
- Non Sergent !
Sa voix était plus jeune, tout était plus jeune en lui, tout était différent.
- Relevez-vous Kanagan et continuez ! On n’abandonne pas. Aller bougez-vous bon sang !
Il lui fila un coup de pied dans les côtes et Rell se releva tant bien que mal pour reprendre le chemin.


L’image s’estompa aussi vite qu’elle était venue. Comme souvent. Il fronça, essaya de rassembler le souvenir et serra les dents. Malgré tout il se remit en marche.
Ordrell
Survivaliste

Dans le ventre du Lion - Partie III



Il y a moins de mauvais lieux qu’il n’y a de mauvais explorateurs.

Quelques jours étaient passés, qui avaient permis à Rell de récupérer correctement de sa blessure. Ce n’était pas encore parfait mais ça allait mieux, il arrivait à marcher sans avoir l’air d’un rebus de clochard.
Il avait continué d’observer les autres et d’explorer le camp. Il avait fini par comprendre que le wagon voyageur dans le grand hangar abritait quelqu’un de blessé ou malade. Chaque jour Cobalt lui rendait visite, parfois d’autres aussi surtout du vieux noyau principal, comme ce bourrin de Deren ou le cuisinier. Mais quand il essayait d’aborder la question, jusqu’à présent il n’obtenait aucune réponse. Que cachaient-ils donc ?

Présentement ils étaient tous réuni, les onze en se comptant lui-même. Cobalt exposait un plan pour la journée.
- J’aimerai qu’on aille aujourd’hui au second centre commercial au-delà de l’autoroute au nord. Pika a repéré avec les Seekers un nouvel accès dans les ruines que nous n’avons pas encore exploré. Possible qu’il y ai des choses à ramasser.
Pika lui restait imperturbable dans son nid, toujours caché sous sa visière mais il semblait écouter d’une oreille.
- Donc qui est volontaire pour cette sortie et m’accompagner ?
- Moi. J’en suis.
C’était Ophélie qui s’était proposée, bientôt suivit d’un gamin de peut être 17ans voir moins, un peu gringalet. On l’appelait Suif.
Un homme noir, Jean-Noël, qu’on résumait à JN, leva une grande paluche.
Poussé par la curiosité et l’envie de sortir de ce trou, Rell leva la main.

- Jviens.
- T’es sur que t’es en état Ord-Rell ?
- Ça ira t’occupes. Jviens je dis.
- Bien, on est 5, ça suffira. Pika suivra notre progression avec les Seekers pour nous avertir en cas de soucis, ou inversement avertir vous autres à la base. Que tout le monde se prépare.

Dès lors chacun rassembla des affaires pour la sortie, Rell ne prit pas ses armes, qu’on jugeait inutile et encombrante pour la situation et changea pour un long couteau. Il se chargea également d’autres matériels notamment en lampe et on lui donna un sac à dos plus large afin de pouvoir rapporter ce qu’ils trouveraient. Ceux qui restaient au camp se préparèrent également au cas où ils auraient besoin de mener une équipe de secours, Deren s’occupant de les organiser. Ils partirent peu de temps plus tard du camp par un accès souterrain.

*
* *


Le petit groupe traversait l’ancienne autoroute non loin d’un échangeur qui s’était éboulé. Quelques carcasses de voitures gisaient encore, comme écrasée par une main géante, rouillée et les vitres disparue. Ils étaient sortie d’une bouche d’égout non loin. Un Seeker les attendait en vrombissant et il les précédait à présent en surveillant les alentours, son câble interminable pendant derrière lui.
De l’autre coté de l’autoroute ils voyaient les structures visées, en bonne partie écroulée, Rell émit quelques doutes. Cependant ils se dirigèrent vers un petit accès qui formait une voute sous les décombres.
Allumant tous leurs lampes qu’ils avaient emportées, ils pénétrèrent dans le dédale sombre et fragile, alors que le Seeker restait dehors. Ils eurent vite fait d’arriver dans des volumes intérieurs impressionnant mais un peu bancal du fait de la construction branlante. Ils avançaient groupés en inspectant chaque recoin. A voix basse Cobalt leur dit :
- Si vous voyez quelque chose d’utile, ou une boutique qui tient encore la route dites-le.
Mais ils n’y avaient rien d’intéressant. Suif commençait à s’exciter et à trottiner parfois dans certain recoins, pour ne rien voir et revenir en râlant. Rell le regardait en coin, le surveillait plutôt, lui marmonnant au cours d’un de ses passages :
- Du calme petit…

Suif opinait, et recommençait son manège cinq minutes plus tard.
Arrivé dans un endroit dégagé de la galerie principale, ils étaient sur les passerelles d’étage, avec des vitrines brisées de part et d’autre et en contrebas au milieu deux autres niveau de galeries.
Suif n’attendit pas et s’élança au milieu vers une passerelle de jonction entre les deux bords.

- Wouh ba voilà, si là il n’y a rien franchement…
Cobalt autant que Rell s’écrièrent en même temps :
- Nan, attends tu … !

Mais trop tard, la passerelle endommagée se brisa sous le gosse et il tomba en criant. Ils le suivirent des yeux et le virent glisser comme sur des toboggans, de restes de béton à un autre, rouler ici et là et se stabiliser bien plus bas.

- Suif !? ça va ? lui cria Cobalt.

Sans répondre, le jeune remua légèrement, il était encore en vie.
Rell soupira et inspecta les alentours, restant immobile, il évalua chaque élément d’où ils se trouvaient. Les autres aussi semblaient réfléchir à la situation.

- Jvais le chercher.
- Quoi ? Cobalt regarda Rell. Nan c’est pas prudent. On doit trouver une solution.
- Le gamin a déjà dépassé le stade de la prudence, jpense pas que vous voulez le laisser ici. Vous avez de la corde ?
- Que comptes-tu faire ?
- Il faut qu’on l’accroche fermement quelque part et jvais descendre le chopper.

Il n’avait pas vraiment le choix, les filles ne seraient pas assez forte pour soutenir le gamin et tenir la corde, et Jean-Noël s’il avait la force était trop lourd, et le poids des deux corps auraient peut être trop tiré sur la corde.
Jean-Noël déroulait déjà un lourd rouleau de corde en lui demandant de sa voix de basse.

- Où comptes-tu l’attacher ? jvais t’aider.
Rell le regarda et lui montra divers piliers et rambardes.
- On va tourner autour de tout ça pour faire une assise multiple et solide.

Ils s’attelèrent à la tâche alors que Cobalt essayait encore de communiqué avec Suif. Il était blessé mais miraculeusement il arriva à se redresser tant bien que mal, mais il était coincé sur une corniche sans pouvoir s’en extraire.
Une fois la corde attachée en divers points, Rell regarda dans le vide. Cobalt le rejoignit.

- Si tu descends d’ici tu ne vas pas l’atteindre, il est plus loin à cause des glissements qu’il a fait. Mais ya un chemin par là bas on dirai pour poursuivre.

Elle montra un point en contrebas encore plus loin que Suif. Toute cette salle était un labyrinthe de plateformes et débris pour passer d’un niveau de boutiques à un autre. Il réfléchi, observa un peu la trajectoire et la salle en balayant de sa lampe.

- J’y vais, jle prend au passage, et vous nous rejoignez un à un.
Ophélie le regardait incrédule.
- En te balançant ?
- Tu vois un autre chemin pour bouger de là vu qu’il a pété la seule passerelle ?
- Fais attention.

Rell se saisi de la corde pour tirer dessus de tester les attaches, tout semblait solide, ça avait intérêt sinon il allait s’écraser comme un insecte en bas.
Il se mit au bord de la passerelle, évaluant encore le trajet vers Suif.

- Tends les bras petit !

Suif se tint debout en tendant les bras sans trop savoir, puis Rell couru dans l’autre sens en s’agrippant fermement à la corde. Il sauta dans le vide et laissa la chute provoquer le mouvement de balancier contre la passerelle en direction de sa cible. Grimaçant à forcer sur la corde, il tendit un bras en passant à coté du jeune et le choppa au passage, lui-même s’accrochant à Rell. Sous le poids subis sa main glissa le long de la corde d’une bonne vingtaine de centimètres, les brulures provoquées par la glissade atténuées par ses mitaines. Balançant un peu des jambes ils arrivèrent au bout du mouvement sur la plateforme visée à l’autre bout de la pièce. Ils se laissèrent tomber au sol en lâchant la corde. Rell se mit à genou avant de se relever et grogna.

- Bon sang… ce qu’il faut pas faire. Plus jamais ça…
- Wouhou ! Merci !
Ord-Rell regarda le jeune et lui mit une tape à l’arrière du crâne.
- P’tit con.
- Outch…

Suif se frotta l’arrière de la tête en regardant l’homme qui était venu le chercher, mais celui-ci ne faisait déjà plus attention à lui et avait les yeux levé.

- A vous ! Utilisez la corde pour nous rejoindre !

Un à un ils l’imitèrent à se lancer dans le sens opposé pour provoquer le mouvement de balancier et les rejoindre. Quand Cobalt les rejoint en dernier, elle fronça les sourcils et s’adressa à Suif.

- On parlera au camp.

L’intéressé pinça les lèvres, il savait qu’il allait passer un sale quart d’heure. Dès lors il les suivit le plus sagement possible sans broncher. En l’inspectant rapidement, ses blessures étaient superficielles, surtout des contusions et égratignures, il avait eu beaucoup de chance.

Poursuivant leur chemin, les trouvailles commencèrent à apparaître. Entre boutique de vêtement, restes de nourriture en conserve ultra longue conservation, des bricoles en vrac dispersées dans les ruines… Ils commencèrent à se servir et remplir doucement les sacs des choses les plus intéressantes.
Malheureusement, concentré sur leur récolte c’est le groupe entier qui ne fit pas attention. Même s’il était de toute façon difficile à détecter, tout le sol d’une boutique était en fragilité. Quand le groupe ajouta son poids, l’ensemble céda et les projeta dans le vide. La chute fut brève, mais ils tombèrent dans une zone remplie d’eau, déversoir qui devait retenir à présent les écoulements d’eau de pluie.
Rell se retrouva à se débattre dans l’eau, alourdit par son équipement. Tous se retrouvèrent dans une quasi obscurité à essayer de se maintenir hors de l’eau. Le bruit, le noir, l’eau… Comme un ras de marée un souvenir le submergea.

Le cri des hommes qui se débattent autour de lui. L’eau est fraiche. C’est la nuit. Une nuit couverte d’un nuage de cendres et de poussières, un horizon sur la côte rougeoyant des flammes nucléaires qui l’ont dévastée plus tôt dans la journée.
Des bruits d’explosions. Non loin, un navire de guerre coule, en proie aux flammes, pratiquement brisé en deux, le croiseur s’enfonce dans l’eau rapidement par la proue. Des taches de lueurs données par des flammes sont visibles un peu partout autour. Toute la flottille est en train de couler. Au loin une grosse explosion éclate, un autre navire a vu sa réserve de carburant touchée, à moins que ce ne soit des munitions.
- Il faut dégager de là !
C’est un marin qui a nagé vers lui. Il regarde autour affolé, cherchant un refuge qui ne semble pas exister.
- Il doit y avoir des canots, il faut trouver les canots !
Rell opine et essaye de suivre, alourdit par son treillis. Il largue dans les profondeurs son arme mouillée qui ne peut plus servir et prend trop de poids.
Par-dessus les bruits du chaos, les vrombissements des drones de l’Ennemi. Il les voit filer comme des ombres au dessus de l’eau, parachevant le travail méthodiquement, tirant sur les hommes dans l’eau de façon froide et calculatoire. Depuis la poupe du croiseur qui sombre, un tir d’AA trou le ciel et détruit un drone. L’artilleur cri quelque chose d’incompréhensible et continue de cribler le ciel comme il peut. En réplique plusieurs drones font demi-tour et transforment l’arrière du navire en chaos de métal tordu.
Un autre drone arrive vers eux. Rell prévient en vitesse.
- Plonge !
Sans attendre de réponse, il s’enfonce sous l’eau pour ne pas être vu. Il voit à peine dans le noir sous l’eau le collègue faire de même. Des balles traversent les vagues, créant des petites trainées de bulles derrières elles. L’autre marin est touché.
Rell reste sous l’eau, il coule…


Oui, il était en train de couler…
On le saisi fermement pour le ramener à la surface. Il reprit de l’air et vit que Cobalt et Ophélie le tenaient. Cette dernière le regarda et lui demanda.

- Ça va aller ?
Il cligna des yeux, un peu hagard, et opina du chef.
- Oui… oui pardon.

Avec leur aide il essaya de nager et rejoindre un bord pour s’accrocher à des tiges de métal tordues. Ils se traînèrent hors de l’eau. Elles avaient du larguer une partie de ce qu’ils venaient de ramasser pour ne pas sombrer, mais lui ne l’a pas fait, il était ailleurs…
JN ramena de son coté Suif sur le bord en le tirant à bout de bras. Tous reprirent haleine quelques minutes avant de se relever. Avec tout ce qui était tombé avec eux de l’étage au dessus, il y avait de quoi faire un monticule qui remontait en haut. Ils s’en servirent donc prudemment pour revenir sur leurs pas.
Fort heureusement les déboires s’arrêtèrent là. Le reste de la balade, à avance lente et encore plus prudent, se fit sans mal. Ils récupérèrent encore quelques bricoles, dont une enceinte à moitié défoncée seulement que Suif ramassa, expliquant vouloir en faire cadeau à Pika. Ils finirent le bout de la galerie par un ancien concessionnaire automobile, pour le coup riche en pièces mais trop pour qu’ils puissent tout prendre. Du coup ils chargèrent les sacs comme ils pouvaient avant de partir tout en sachant qu’ils devraient revenir un jour.
Le problème c’est qu'ils étaient tellement loin du point d’entrée d’origine, qu’il fallait trouver une autre façon de rentrer. En émergeant à la lumière du jour par un accès totalement différent, ils étaient loin du chemin d’origine. JN inspecta les alentours, chercha des repères avant d’expliquer.

- On a dévié au Nord Nord-Est. Le centre ville est par là bas. Il tendit le bras dans une direction. Mais par ici, il y a une station de métro qu’on peut récupérer et suivre vers le sud, ça nous approchera de chez nous.
- La ligne Est ? lui demanda Cobalt.
- C’est ça.
- Alors c’est bon, puisqu’après de là on peut passer du métro aux tunnels d’égouts, on peut rentrer sans être vu.

Ils étaient tous sales et chargés, et c’est avec un petit soulagement qu’ils aperçurent un Seeker venir vers eux, les ayant repérer. Il sonna bizarrement, une sorte de klaxonne, bip, son de corne, tout ça à la fois, et Cobalt leva le pouce pour signifier que tout allait bien. L’engin flottant les suivit jusqu’à la bouche du métro. De là ils purent descendre au frais dans le large tunnel ferroviaire à deux voies. Il fallu une bonne heure supplémentaire pour rentrer au camp.

*
* *


Le lendemain matin, tout le monde était au travail sur la remise en état des trouvailles. Les nombreuses pièces et autres boîtes et habits étaient étalés dans le hangar, chacun allant selon son savoir faire récupérer pour rafistoler ce qu’il pouvait.
Ce qu’ils ne gardaient pas devait être vendu à un troqueur avait expliqué Cobalt, et donc ils devaient proposer de bonnes marchandises pour optimiser le troc.
Comme promis elle s’était d’ailleurs entretenue avec Suif dès leur retour, ils s’étaient isolés et Rell ne savait pas ce qu’ils s’étaient dit même s’il en devinait un peu la teneur.
De son coté Pika bricolait l’enceinte qu’on lui avait rapporté. L’air ravi, il fini une dernière connexion pour l’assembler avec les autres enceintes plus ou moins en état qu’il avait jusque là.
- Ça vous dit du son un peu ce matin ? Demanda t-il.
Plusieurs le regardèrent et opinèrent du chef. Sans se faire prier, il mit en route une musique.

https://www.youtube.com/watch?v=1ZCF8ngqeA8#t=47m35s

Ord-Rell qui était concentré au décrassage d’une pièce moteur sursauta brutalement et regarda autour.
Ophélie lui sourit et posa une main sur son bras.

- Du calme, c’est juste de la musique.
- Vous avez de la musique ici…
- Oui, on n’en met pas souvent car ça bouffe du jus, mais de temps en temps…
- J’en ai pas entendu depuis…
Il secoua doucement la tête. Des années oui, probablement avant le Grand Flash, il ne s’en souvenait plus vraiment. Si on exceptait cette maudite electro-réclame allemande qui ne méritait pas vraiment le titre de musique.
- Profite alors !

Pika laissa la musique tourner et se renfonça dans son nid, enfilant son casque de contrôle des Seekers et prit la manette en main. Il se dandinait en rythme dans son fauteuil, bientôt suivit par d’autres qui se levèrent et décidèrent de se dégourdir un peu. Poussant un petit soupire, Rell fini tout de même par hocher la tête en rythme en regardant les autres du coin de l’œil. Chacun semblait profiter un peu de cette pause bienvenue. Tout le monde semblait d’humeur joviale. Ça le mettait un peu mal à l’aise malgré tout.
Ophélie reposa les boîtes de conserve qu’elle était en train d’inspecter une à une, et se leva pour danser et l’invita en tendant la main.

- Aller viens !
- Heu non non… je danse pas moi. Merci…
- Va falloir te décoincer un jour mon grand.

Elle lui sourit et s’éloigna un peu pour se dandiner. Il l’observa bouger, et elle se déhancha et tourna sur elle-même en sachant très bien qu’il la regardait. Ses mains restaient sur sa pièce sans qu’il ne fit rien. Il ne se rendit pas compte qu’il fixait la danseuse depuis quelque temps. Peut être qu’après un peu trop de solitude il s’habituait à avoir un peu de compagnie, ou désirait un peu de compagnie, et pas que pour la journée. Il navigua sur ses courbes et s’efforça de penser à autre chose, regardant ailleurs. Suif bondissait sur place avec la musique avec toute l’énergie de sa jeunesse, ignorant ses blessures mais rattrapé par celles-ci lors d’un mouvement qui le fit grimacer. Ses yeux revinrent sur Ophélie qui s’approchait d’un autre danseur pour bouger avec. Il pinça un peu les lèvres et se dit que de toute façon c’est lui qui avait choisi de ne pas y aller. Il fut sorti de sa rêverie sans prévenir.
Pika arrêta brusquement la musique, et sonna trois fois d’une cloche pendue au dessus de son nid. Tout le monde se figea et tourna les yeux vers lui. La bonne humeur retomba aussitôt comme un soufflé et les yeux prirent une teinte inquiète. Cobalt fut la première à parler.

- Pika ? Qu’est-ce qui se passe ?
Sans enlever sa visière, triturant nerveusement sa manette, l’intéressé répondit.
- Des chevaucheurs de métal. Ils sont là, à 700 mètres…

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